Opinion - David G. Boo, le sacrifice du soldat Zemmour

Eric Zemmour est anti-système, entend-on ça et là. Mais pour un anti-système, il faut avouer que le "système" le traite plutôt bien : il est invité partout. Un Dieudonné, ni plus ni moins provocateur que Zemmour, n'est invité nulle part.
Et que veut dire "anti-système" ? De quel "système" s'agit-il ? Quand on creuse, on finit par comprendre qu'anti-système qualifie une attitude qui consiste à rejeter la pensée dominante, ou la pensée dite "unique". En quoi consiste cette pensée unique ? On apprend encore que cette pensée présenterait les caractères suivants: élitiste, libérale, progressiste. Que par opposition à une pensée dite "réactionnaire", ou "de clocher", elle défendrait notamment les droits des femmes, des minorités, des homosexuels, des étrangers et le libéralisme économique.
Où placer Eric Zemmour dans ce cadre? Si on l'écoute, il est réactionnaire, misogyne, intolérant, homophobe, raciste et nationaliste. Donc bien anti-système. Mais l'est-il vraiment ? On en doute. Sinon, le système ne le traiterait pas comme il le traite, avec les plus grandes faveurs, et surtout il ne passerait pas son temps avec ceux-mêmes à qui il professe de mener la plus impitoyable des guerres.
Dans une charge contre Eric Zemmour, le chroniqueur Bruno Roger-Petit, du Nouvel Observateur, présente celui-ci comme "l'écho fidèle de l'inconscient de la droite profonde". Mais l'est-il ? N'en est-il pas plutôt la caricature ?
Dans ses dernières sorties, Zemmour réhabilite le régime de Vichy et Pétain lui-même. On se dit qu'il commence à pousser la provocation un peu loin et qu'il va finir comme Dieudonné, banni. Mais non, au contraire : son succès redouble et partout il trouve une tribune.
Il nous reste une hypothèse pour comprendre cet étrange état de fait : c'est qu'Eric Zemmour tient un rôle, et un rôle que ce "système", celui qu'il critique, lui a assigné. Son rôle : incarner l'amalgame entre pétainisme et conservatisme. En incarnant cet amalgame, Eric Zemmour permet au "système" de poser l'équation anti-avortement = pétainiste, anti-mariage gay = pétainiste, anti-GPA = pétainiste, anti droit de vote des étrangers = pétainiste, anti-libéralisme économique = pétainiste, etc. Et ceci, quelle que soit la valeur des arguments proposés de part et d'autre. Une position nuancée sur l'avortement, comme celle de Simone Veil, serait tout aussi pétainiste. Une position éthique sur la GPA ne le serait pas moins. C'est-à-dire qu'Eric Zemmour permet, en incarnant ce qu'il incarne, l'image de la réaction la plus outrée, en lui donnant corps, de neutraliser d'un seul qualificatif, pétainiste, toute critique... du système. Et caricaturer et ridiculiser, par la même occasion, ses admirateurs les plus naïfs.
Si Eric Zemmour est bien ce que nous pensons, un homme du système, alors il faut apprécier à sa juste valeur le sacrifice du soldat Zemmour. Passer une vie médiatique à dire le contraire de ce qu'on l'on est et de ce que l'on pense est une forme d'abnégation assez rare pour être mentionnée. Un suicide français, en quelque sorte.
C'est pratique qui consiste, pour l'élite, à contrôler l'opposition de peur que quelqu'un d'autre ne la contrôle, à la former, à la manipuler, cette pratique a un nom. Son nom, c'est Citizen Kane qui le lui a donné.
Le 15 octobre 2014
Et que veut dire "anti-système" ? De quel "système" s'agit-il ? Quand on creuse, on finit par comprendre qu'anti-système qualifie une attitude qui consiste à rejeter la pensée dominante, ou la pensée dite "unique". En quoi consiste cette pensée unique ? On apprend encore que cette pensée présenterait les caractères suivants: élitiste, libérale, progressiste. Que par opposition à une pensée dite "réactionnaire", ou "de clocher", elle défendrait notamment les droits des femmes, des minorités, des homosexuels, des étrangers et le libéralisme économique.
Où placer Eric Zemmour dans ce cadre? Si on l'écoute, il est réactionnaire, misogyne, intolérant, homophobe, raciste et nationaliste. Donc bien anti-système. Mais l'est-il vraiment ? On en doute. Sinon, le système ne le traiterait pas comme il le traite, avec les plus grandes faveurs, et surtout il ne passerait pas son temps avec ceux-mêmes à qui il professe de mener la plus impitoyable des guerres.
Dans une charge contre Eric Zemmour, le chroniqueur Bruno Roger-Petit, du Nouvel Observateur, présente celui-ci comme "l'écho fidèle de l'inconscient de la droite profonde". Mais l'est-il ? N'en est-il pas plutôt la caricature ?
Dans ses dernières sorties, Zemmour réhabilite le régime de Vichy et Pétain lui-même. On se dit qu'il commence à pousser la provocation un peu loin et qu'il va finir comme Dieudonné, banni. Mais non, au contraire : son succès redouble et partout il trouve une tribune.
Il nous reste une hypothèse pour comprendre cet étrange état de fait : c'est qu'Eric Zemmour tient un rôle, et un rôle que ce "système", celui qu'il critique, lui a assigné. Son rôle : incarner l'amalgame entre pétainisme et conservatisme. En incarnant cet amalgame, Eric Zemmour permet au "système" de poser l'équation anti-avortement = pétainiste, anti-mariage gay = pétainiste, anti-GPA = pétainiste, anti droit de vote des étrangers = pétainiste, anti-libéralisme économique = pétainiste, etc. Et ceci, quelle que soit la valeur des arguments proposés de part et d'autre. Une position nuancée sur l'avortement, comme celle de Simone Veil, serait tout aussi pétainiste. Une position éthique sur la GPA ne le serait pas moins. C'est-à-dire qu'Eric Zemmour permet, en incarnant ce qu'il incarne, l'image de la réaction la plus outrée, en lui donnant corps, de neutraliser d'un seul qualificatif, pétainiste, toute critique... du système. Et caricaturer et ridiculiser, par la même occasion, ses admirateurs les plus naïfs.
Si Eric Zemmour est bien ce que nous pensons, un homme du système, alors il faut apprécier à sa juste valeur le sacrifice du soldat Zemmour. Passer une vie médiatique à dire le contraire de ce qu'on l'on est et de ce que l'on pense est une forme d'abnégation assez rare pour être mentionnée. Un suicide français, en quelque sorte.
C'est pratique qui consiste, pour l'élite, à contrôler l'opposition de peur que quelqu'un d'autre ne la contrôle, à la former, à la manipuler, cette pratique a un nom. Son nom, c'est Citizen Kane qui le lui a donné.
Le 15 octobre 2014